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La position états-unienne face aux défis environnementaux

La pensée unilatérale développée par certains dirigeants états-uniens peut paralyser les actions écologiques mondiales.

Ainsi, l’environnement est l’objet de tensions entre ses divers acteurs ; démontrés par la dualité marquante de ses enjeux, divisés entre croissance économique et protection de la nature.

Par ailleurs, l’environnement défini comme une combinaison d’éléments culturels et sociaux en interaction constituant le cadre de vie d’un individu ou d’un groupe, se voit de plus en plus légitimé sur la scène médiatique.

En filigrane, c’est la question environnementale dans les discussions internationales qui est en essor. S’effectuant par la prise de conscience massive des citoyens, cette question environnementale incite les acteurs étatiques à prendre des mesures contre le réchauffement et les dérèglements climatiques.

Les Etats-Unis, étant le plus grand émetteur mondial de gaz à effets de serre par habitant, possède alors un caractère historique dans cette lutte et se positionne en tant qu’acteur majeur et nécessaire pour annihiler le caractère anthropique du changement climatique. Mais son désir d’actions est variable et ses propositions écologiques oscillent suivant le président que le pays nomme à sa tête.




Les mesures nationales adoptées


A la fin du XIXe siècle, la question environnementale s’est invitée au débat public. Et en effet, des observations alarmistes montraient et montrent encore aujourd’hui que la Terre se réchauffe à une vitesse considérable et que les événements climatiques extrêmes ne vont être que croissants. Ainsi, les Etats Unis n’échappent pas à cette règle. Pour tenter de pallier ce phénomène ou au moins essayer de l’atténuer, des parcs nationaux comme Yellowstone en 1872 se développent.

Dans le même élan, deux courants vont émerger. Le premier est le préservationnisme. Porté par John Muir (1838-1914), écrivain américain, ce courant vise à préserver la nature pour elle même. L’objectif est donc de protéger la nature seule, sans l’Homme. Cette approche bio centrée peut être nuancée par une autre vision, moins radicale nommée le conservationnisme. Ce courant écocentrée, porté par Gifford Pinchot (1865-1946), préconise une gestion plus raisonnée des ressources naturelles. L’objectif est alors de protéger la nature pour qu’elle constitue un réservoir de ressources pour l’Homme et de façon pérenne.


Le président Theodore Roosevelt (1858-1919) joue un rôle majeur dans l’alliage entre courant conservationniste et développement des parcs naturels pendant ses mandats, entre 1901 et 1909. Passionné par la nature et les sciences naturelles, il oriente la politique nationale vers la protection de la nature et de la gestion des ressources en permettant la création de 150 forêts protégées, de cinq parcs nationaux et de 51 réserves ornithologiques. Sa présidence est un tournant dans l'histoire environnementale des Etats-Unis par la sanctuarisation de l'environnement.

Et avec son impulsion, les États-Unis comptent aujourd'hui 62 parcs nationaux, dont la superficie représente 2,2 % du territoire et qui totalisent 400 millions de visiteurs par an.

Par la suite, la cause environnementale connaît un regain d’ambitions et d’attention dans les années 1960. Des mouvements sociaux émergent alors. C’est le cas de « l’Environmental Defense Fund » en 1967 ou du « National Resources Defense Council » en 1970, qui incarnent cette recrudescence. Plusieurs présidents vont alors poursuivre une politique écologique, en accord avec les jalons posés par Roosevelt mais également synonyme de la prise de conscience environnementale populaire aux Etats-Unis.

Des lois pro-écologie vont être votées entre 1960 et 1980 principalement. C’est le cas du Clean Air Act en 1963, sous la présidence de Lyndon B. Johnson (1908-1973), qui permet la régulation de la pollution de l’air.

Dans la même lignée, en 1970, le président Richard Nixon (1913-1994) fonde l’EPA (l’Agence de protection de l’environnement des Etats-Unis), qui légifère sur les questions environnementales et protège la santé. Une avancée à l’échelle nationale majeure puisque l’agence demeure encore aujourd’hui le centre névralgique de la régulation environnementale américaine.

Il faudra ensuite attendre la présidence Obama (né en 1961) qui débutera en 2009 et se poursuivra jusqu’en 2017, pour observer de véritables avancées sur la question environnementale. Estimant que le changement climatique était l’un des « défis clefs » de notre époque, il érigera en 2014 le « Clean Power » (le plan pour une énergie propre) qui vise à réduire de 32%, à l’horizon 2030, les émissions de CO2 provenant du secteur de la production d’électricité, par rapport à 2005.

Héritier de sa vison environnementale, Joe Biden (né en 1942), président américain actuel, propose un plan d’investissement de 2000 milliards de dollars dans les infrastructures, comprenant le nettoyage des zones à déchets polluants toxiques, des terrains miniers abandonnées ou encore des puits de gaz non bouchés. Enfin, le 46e président des Etats-Unis a promis en avril 2021 de réduire les émissions de gaz à effet de serre états-uniennes de 50% à 52% d’ici 2030. Cet objectif est porté par l’ambition d’atteindre 100% d’électricité décarbonée dès 2035.



Des mesures internationales


Sous l’impulsion des rapports des experts internationaux du GIEC (groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), la Communauté internationale a pris conscience de la responsabilité des actions humaines dans les dérèglements climatiques, qui mènent à des conséquences irréversibles tant pour les écosystèmes que pour l’humanité.

Pour endiguer le réchauffement climatique d’origine anthropique, les Nations unies ont alors mis en place la CCNUCC (Convention Cadre des Nations unies sur les Changements Climatiques). Conclue lors du Sommet de la Terre à Rio en 1992, elle fut ratifiée par 189 États à New York, capitale culturelle des États-Unis. La convention fixe pour objectif ultime, la stabilisation des concentrations de gaz à effet de serre à un niveau qui empêche toute perturbation dangereuse du système climatique. Cet objectif n’est pas chiffré et c’est l’ONU qui est à l’initiative du projet.

L’ONU compte parmi ses membres les États-Unis, y occupant une place majeure. En effet, leur superpuissance ne peut que jouer un rôle moteur dans l’organisation et l’idée selon laquelle il serait possible de bâtir un monde plus écologique sans l’engagement et la coopération actives des Etats-Unis n’est pas crédible. Par ailleurs, les Etats-Unis ont toujours été un pays de précurseurs aux idées pragmatiques, c’est alors que l’existence même de l’ONU est due à un président américain : Franklin D. Roosevelt.

Dans le cadre de la CCNUCC, les Parties se sont engagées à réaliser des inventaires nationaux des émissions de gaz à effet de serre. L’organe suprême de la Convention est alors la Conférence des Parties (COP) qui se réunit chaque année.

Sous la présidence Trump, bien qu’une délégation américaine fût envoyée chaque année, les États-Unis se sont faits discrets lors des Conférences des Parties. Mais la COP 26, dernière en date, ayant eu lieu à Glasgow en 2021 sous le mandat Biden, vient inverser cette tendance. En effet Washington et Pékin, alertés par le sixième rapport du GIEC publié le 9 août 2021, ont annoncé un accord conjoint sur le renforcement de l’action climatique. Ils s’engagent alors à limiter leurs émissions de gaz à effet de serre et à maintenir une température terrestre globale « en-deçà de 2°C», même si, selon l’ONU, le monde se trouve sur une trajectoire de +2,7°C.

La Chine et les États-Unis, plus grands émetteurs de gaz à effet de serre, ont ainsi l’intention d’accélérer la transition vers une économie nette zéro mondiale.

Les États-Unis ont par ailleurs affirmé leur intention de créer un « Groupe de travail sur le renforcement de l'action climatique dans les années 2020 », qui se réunira régulièrement pour faire face à la crise climatique et faire progresser les actions multilatérales.



Des mesures érigées par des acteurs non-gouvernementaux


Parmi ces acteurs, on retrouve de nombreuses ONG. Les ONG environnementales américaines jouent un rôle essentiel à tous les échelons. Les plus puissantes comme « The Nature Conservancy » sont très actives à Washington, elle pour la préservation de la faune et de la flore par la mise en réserve et la protection des ressources naturelles. Cette organisation américaine privée joue alors un rôle primordial dans la protection de la nature. Y compris, à une échelle internationale puisque « The Nature Conservancy » exerce sa zone d’influence dans 72 pays et sur cinq continents.

De même, l’ONG « Wildlife Conservation Society », dont le siège social est cette fois-ci à New York, fournit un travail de recherche scientifique et de programmes de préservation de la nature. Elle est quant à elle influente dans 65 pays. Le point commun de ces deux organisations est tout d’abord les aides publiques de l’Etat américain qu’elles reçoivent, preuve d’une certaine contribution des pouvoirs publics (gouvernement et services chargés de l’administration étatique). Mais également leur activité accrue dans les instances internationales où elles forment un puissant « lobby vert » grâce à leurs experts (scientifiques ou juristes.). Ce « lobby vert » traduit la stratégie menée par un groupe écologique cherchant à défendre ses propres intérêts auprès des décideurs politiques.




Les acteurs privés s'engagent ainsi également en faveur de la cause environnementale. Et en particulier les acteurs économiques, qui voient des opportunités de croissance économique dans le développement de l'économie verte. C’est alors le cas des Firmes Transnationales (FTN), qui, soucieuses de leur image et de leur rentabilité, s'engagent aussi pour l'environnement.

Entre 2007 et 2017, par exemple, 22 milliards de dollars ont été investis dans les firmes de l'énergie verte au sein de la Silicon Valley. Les FTN investissent également dans les technologies environnementales innovantes.

Par ailleurs, en 2017, une multitude de FTN américaines ainsi des Etats fédérés ou des ONG se sont regroupés au sein de l'organisation « We Are Still In » dans le but de se substituer à l'Etat fédéral dans la réalisation des objectifs de l'accord de Paris. 902 entreprises dont des FTN comme Danone y ont pris part. Les GAFA, Google, Amazon, Facebook et Apple, faisait également parti du projet. Sachant que les GAFA représentent la superpuissance des entreprises américaines sur la scène internationale, leur soutien montre l’impact international du mouvement écologique.

L'objectif de cette coalition environnementale était de réduire les émissions de CO2 des États-Unis de 28 % par rapport à leur niveau de 2005, c'est-à-dire de respecter les engagements pris par l'administration Obama lors de l'accord de Paris en 2016.

Cet exemple témoigne de la mobilisation de plus en plus forte des acteurs locaux aux Etats Unis dans la politique environnementale internationale. Les FTN investissent alors pour accélérer la transition énergétique et réduire leur impact environnemental. Cependant, leurs actions s'apparentent parfois à du greenwashing (article sur le greenwashing disponible sur le sujet sur notre blog)



Les limites de ces nombreuses mesures


« Le mode de vie américain, c'est sacré », dira George W. Bush, lorsqu'il justifiera sa décision, en mars 2001, de ne pas ratifier le protocole de Kyoto au Sénat américain.

Dès lors, demeure l’“American Way of Life”, le mode de vie de l’excès et de la profusion démesurée qui se construit aux antipodes d’un mode de vie écologique.

La ville de Las Vegas en est par exemple l’archétype. En effet, la ville a tout d’abord connu une forte croissance démographique entre 1990 et 2000, faisant d’elle, aujourd’hui, la ville la plus peuplée du Nevada. De plus, son tourisme de masse, engendré par son attractivité et son image festive, accentue la pollution du territoire ; quand dans un même temps la dépense en électricité atteint des sommets. En effet, malgré les plans en matière d’énergies renouvelables mis en place au Nevada, la ville est toujours un colosse consommateur d’énergie qui consomme de l’énergie plus vite qu’il ne peut en produire. Les nombreux casinos, aux machines à sous toutes plus lumineuses les unes que les autres, aux climatisations en continu ou aux ampoules qui fleurissent dans presque tous les bâtiments, sont des monstres de consommation énergétique et intrinsèquement de pollution. De plus, les faibles précipitations dans la région accentuent ce phénomène, ne permettant pas la dispersion de la pollution. En définitive, Las Vegas comme d’autres villes américaines, représente à elle seule le paroxysme

de l « American Way of Life », un mode de vie incompatible avec la question environnementale.


La folie lumineuse de Las Vegas



Or, les grandes villes de surconsommation représentent, dans la période d’après-guerre des Trente Glorieuses, un idéal. Un idéal qui ne peut s’effectuer que dans un milieu urbain. Émerge alors le phénomène « d’étalement urbain », défini comme la progression des surfaces urbanisées à la périphérie des villes.

Mais l’étalement urbain présente plusieurs limites à la protection de l’environnement. Tout d’abord, il conduit à une construction de nouveaux habitats en périphérie des villes, reliés à celles-ci par des routes. Leurs constructions ainsi que l’utilisation intensive de la voiture et en filigrane du pétrole, constituent un frein écologique majeur. En outre, l’extension urbaine, alliée aux constructions de logements ont pour conséquence directe l’artificialisation des sols. Et l’artificialisation des sols est aujourd’hui l’une des causes premières du changement climatique et de l’érosion de la biodiversité.


Plusieurs chiffres démontrent alors l’effet dévastateur et néfaste du mode de vie à « l’américaine ». Par exemple, si tout le monde consommait comme la moyenne américaine il faudrait 6,81 planètes pour subvenir aux besoins de toute la population. De plus, aujourd’hui, c’est l’exploitation du pétrole et du gaz de schiste, des énergies ultrapolluantes, qui garantit l’autosuffisance énergétique du pays. Elle s’effectue dès lors au prix de dégradations environnementales importantes.

Et pour lutter contre ces externalités négatives, les politiques gouvernementales ne sont pas toujours à la hauteur.



Une politique en "stop and go"


Ainsi, nous pouvons observer la mise en place d’une politique américaine qui diverge selon les idéologies présidentielles et selon la place accordée à l’économie nationale au détriment de l'environnement.

Les politiques sont alors tout d’abord clivantes en fonction du chef de l’Etat. Ainsi de 1981 à 1989, Ronald Reagan (1911-2004) abaisse le budget alloué à la protection de l'environnement. Il bouleverse alors le système mis en place et affirme l’importance moindre de l’écologie dans son mandat. Le nouveau président républicain voit le récent foisonnement de règles et normes environnementales comme une entrave contre-productive au bon fonctionnement des mécanismes du marché.


L'hostilité reaganienne se poursuit avec George Walker Bush. Président de 2000 à 2009, il augmentera les investissements dans les nouvelles technologies (NTIC) polluantes et s’opposera au protocole de Kyoto, qu’il voit comme une entrave à l’essor de l’économie américaine. Le protocole de Kyoto définit des obligations pour l’après 2000 et prévoit des objectifs de réduction ou de limitation des émissions de gaz à effet de serre à hauteur de 5,2%.

Dès lors, en refusant la ratification de cet accord, le mandat Bush avancera dans une logique unilatérale.


En outre, en juin 2017 le président des États-Unis de l’époque, Donald Trump, annonce son retrait de l’accord de Paris. Un accord qui avait été convenu lors de la COP21 et entre 194 pays, visant à limiter sous les 2°C l'augmentation de la température moyenne sur Terre.

Mais Donald Trump, fidèle à ses promesses de campagne, juge cet accord trop contraignant et s’effectuant aux dépens des emplois américains. Si ce retrait ne sera effectif qu’en 2020 et que l’élection de Joe Biden l’annulera, il témoigne néanmoins d’une volonté accrue de relancer l’économie de la première puissance mondiale même si cela doit compromettre l’avenir de la planète. De plus, la crainte des autres pays que la lutte contre le réchauffement climatique se trouve grandement altérée par le retrait des États-Unis, démontre l’importance des actions américaines.



Reagan, Bush et Trump, de gauche à droite




In fine, nous avons pu observer que pourtant pionniers dans la prévention environnementale jusque dans les années 1980, les États-Unis sont devenus au fil des ans et via des politiques parfois climatosceptiques l'un des plus mauvais élèves sur la question environnementale à l'échelle mondiale.

En définitive, les États-Unis peuvent à la fois être les acteurs majoritaires dans la lutte contre le réchauffement climatique, pour la protection de l’environnement, mais également le frein puissant à ces mêmes causes. Un frein d’autant plus important que les États-Unis pèsent grandement sur l’échiquier international. Étant la première puissance mondiale, ses décisions ont un poids majeur et étant le premier contributeur de gaz à effet de serre par habitant mondial, son respect des accords internationaux est d’une importance capitale. Mais les États-Unis ne sont pas le seul pays à blâmer sur la question environnementale.


Des pays comme la Chine demeurent également un obstacle important de la lutte contre les dérèglements de l’environnement. En effet, celle-ci représente par exemple, le plus grand contributeur de gaz à effet de serre mondial en proportion et non par nombre d’habitants. Pourtant, Pékin se trouve parfois réfractaire à une politique plus écologique. Une réfraction allégorisée par exemple, par l’annonce de la non-signature du protocole de Kyoto mais depuis nuancée avec la signature de l’accord de Paris ou la promesse d’une neutralité carbone chinoise pour 2060.

Reste alors à savoir comment les grands émetteurs de gaz à effet de serre et plus généralement les acteurs étatiques articuleront leur politique économique et leur politique écologique dans le futur pour espérer une amélioration des conditions environnementales. Et aux États-Unis, si l’élection de Joe Biden redonne espoir aux écologistes, faut-il encore que le président lui succédant consolide les avancées entreprises et non, a contrario, les annihile.


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